Un pas dans l’Espérance… : 6ème Dimanche de Pâques 25 mai 2025

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Que d’espérance dans les lectures de ce jour ! Cette vision de la nouvelle Jérusalem, habitée par la gloire – càd le poids de la présence – de Dieu, illuminée de l’intérieur par l’Agneau immolé et vainqueur de la mort (Ap 21, 10-14.22-23). Et ces promesses de Jésus à ses disciples peu avant sa mort : « Si quelqu’un m’aime, mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui… et, chez lui, nous nous ferons une demeure… L’Esprit Saint que le Père enverra en mon nom vous enseignera tout, et il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit… Je m’en vais, et je reviens vers vous. » Au cœur de cette espérance, un don, au présent : « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix… » (Jn 14, 23-29)
 

Comment peux-tu parler de ta paix, comment peux-tu donner ta paix, Jésus, alors que dans quelques heures tu vas souffrir et mourir ? Que tu offres ta paix le soir de Pâques, Ressuscité, cela nous étonne moins, mais maintenant, au seuil de ta passion, c’est surprenant ! Comment peux-tu inviter tes disciples à la confiance, et même à la joie, alors que tu leur annonces ta mort ? Sans doute parce que tu vis déjà la promesse que tu leur fais, l’espérance que tu nous ouvres… Tout l’évangile de saint Jean nous le montre : tu as gardé la parole du Père et tu la portes à tes amis, tu te sais infiniment aimé par ton Père, tu demeures en lui et lui demeure en toi… Alors, tu peux vivre ta mort comme en passage vers le Père, un retour à la source de ton être, un retour à Celui qui t’a envoyé et vers qui tu étais tourné dès le commencement (cf. Jn 1,1) Enracine ta Parole en nos cœurs pour qu’elle nous fasse vraiment vivre. Que ton Esprit nous la rappelle aux heures où nous avons besoin d’un appui pour traverser la souffrance, la peur, la mort, le deuil… Qu’elle soit alors l’ancre de notre Espérance… Viens demeurer en nous et donne-nous de nous ouvrir de plus en plus à ta présence. Sois notre lumière intérieure, la mystérieuse joie pascale capable de cohabiter avec les ténèbres… Sois notre paix…

Depuis que Jésus a promis cette paix, depuis que les apôtres l’ont abondamment certifiée, le monde en a vu de ces conflits, de ces guerres, de ces conflagrations, toutes plus sanglantes les unes que les autres. La promesse de Jésus serait-elle une illusion ? Or, il se fait que ce même Jésus nous a aussi promis des conflits et des guerres, autant que la grâce et la paix : « On se dressera nation contre nation et royaume contre royaume […] » La paix promise par Jésus ne supprimera pas les conflits, mais pour ses disciples, elle changera leur façon de les subir. Jésus ajoute, en effet : « Lorsque vous entendrez parler de guerres, ne vous effrayez pas. » […] Cette paix qu’il promet, il l’a appelée « ma » paix, c’est-à-dire sa paix à lui ; et il ajoute on ne peut plus clairement, pour la distinguer de l’autre : « Je ne vous la donne pas comme le monde la donne. » Cette différence est d’abord dans le fait qu’elle est une réalité intérieure au disciple de Jésus : elle est d’abord au-dedans de lui. Ce n’est qu’après coup, une fois qu’il l’aura repérée dans son cœur, qu’elle pourra éventuellement rayonner à l’extérieur, sur des événements sur lesquels les croyants ont généralement peu de prise. Tout comme le royaume de Jésus n’est pas de ce monde, mais qu’il est « au-dedans de vous », dit Jésus à ses disciples, ainsi la paix de Jésus est au cœur de ses disciples, elle est un trésor caché qui attend d’être découvert.

Dom André LOUF, L’homme intérieur. Au cœur de l’expérience spirituelle chrétienne, Paris, Salvator, 2021, pp. 59-60

En 1942, Etty Hillesum, juive d’Amsterdam qui jouit encore d’une semi-liberté, écrit dans son journal intime : La vraie spoliation c’est nous-mêmes qui nous l’infligeons. Je trouve la vie belle et je me sens libre. En moi des cieux se déploient, aussi vastes que le firmament. Je crois en Dieu et je crois en l’Homme, j’ose le dire sans fausse honte. La vie est difficile mais ce n’est pas grave […] Si la paix s’installe un jour, elle ne pourra être authentique que si chaque individu fait d’abord la paix en soi-même, extirpe tout sentiment de haine pour quelque race ou quelque peuple que ce soit, ou bien domine cette haine et la change en autre chose, peut-être même à la longue, en amour – ou est-ce trop demander ? C’est pourtant la seule solution. […] Je suis une femme heureuse et je chante les louanges de cette vie, oui, vous avez bien lu, en l’an de grâce 1942, la énième année de la guerre. […] Notre unique obligation morale, c’est de défricher en nous-mêmes de vastes clairières de paix et de les étendre de proche en proche, jusqu’à ce que cette paix irradie vers les autres. Et plus il y a de paix dans les êtres, plus il y en aura aussi dans ce monde en ébullition.

Etty HILLESUM, Une vie bouleversée, Paris, Seuil (Points), 1995, pp. 132-133 et 227

Pour vous,

Oscar MUREKEZI, votre curé.