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Feuillets du deuxième dimanche de Carême

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Marie-Médiatrice
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Ce mercredi, j’ai reçu un message d’un confrère : « Julien a quitté le ministère. » Un confrère quitte son ministère. Un de mes pairs arrête de porter sa charge. Je sais que, chaque année, de par le monde, des prêtres demandent à être relevés de leurs promesses d’ordination (prière du bréviaire, obéissance à leur évêque et célibat). Je sais aussi quelles vont être les réactions que je vais lire, voir, entendre : « C’est à cause du célibat des prêtres ! » « Les charges sont trop lourdes ! » « La formation n’est pas suffisante ! » « Il ne priait pas assez ! » « Il ne s’est pas méfié d’une tentatrice ! » Je sais que je vais lire ces phrases sur les réseaux sociaux. Outre l’aspect particulièrement misogyne de la dernière phrase, il est vrai qu’elles soulèvent toutes des véritables questions actuelles. Mais aujourd’hui, que m’importe ! C’est Julien. J’étais au séminaire avec lui. J’ai étudié avec lui. J’ai bavé sur les déclinaisons et conjugaisons grecques avec lui. On a été inattentifs ensemble aux quelques cours inintéressants de théologie. On a régulièrement refait le monde ecclésial à table, ou autour d’un verre. On a partagé 4 années de vie communes au séminaire de Namur. Ce n’était sans doute pas celui dont j’étais le plus proche, mais certainement pas celui dont j’étais le plus éloigné. Et puis, on était de la même année de cours. On était 3 à sortir la même année : Julien pour Tournai, Éric pour Namur et moi pour Liège. Avec Julien, on a été ordonnés prêtres le même jour, le même dimanche de juin 2015, chacun dans son diocèse. J’avais quelque peu perdu contact avec lui, la distance et les agendas chargés nous permettant difficilement de nous rencontrer. Lors de rencontres de jeunes, j’avais bien quelques vagues échos, plutôt positifs. Cela ne m’étonnait pas : c’est un brave type dans tous les sens du terme.

Et là, « Julien a quitté le ministère. » Je n’ai même pas de question, ou d’avis sur quoi que ce soit en ce moment. Je ne connais rien, même des circonstances ou des causes. Simplement, il arrête. Toutes les questions, les réflexions, les grandes idées sont parties. Je pense juste à lui, à la réalité de son départ. Je suis sûr qu’il y a en lui une souffrance dans ce départ. Et je ressens également une souffrance. C’est comme une béance dans mon cœur. Son départ crée un vide. Sa place sera désormais toujours vide.

De plus, on a le même âge, on a été formés ensemble, et lui s’en va. J’imaginais qu’il serait toujours là, dans son diocèse, et moi dans le mien. Je ne me permettrais jamais de juger les raisons qui l’ont poussé à prendre sa décision et je suis certain qu’il a agi en conscience. Je ne suis pas meilleur que lui. Je ne compte pas quitter le ministère, mais cela me touche profondément. Cela me renvoie à mon propre ministère. Être prêtre en paroisse, c’est avant tout se mettre à la suite de Jésus. Je veux bien te suivre, Seigneur. J’étais même prévenu à l’avance que ton chemin n’évitera jamais la croix. Mais même si je ne te suivais pas, ces croix jalonneraient ma route. Elles sont nombreuses et variées ces croix qui marquent chaque vie humaine. Finalement, heureusement que tu y es passé aussi, on s’y sent moins seul, moins perdu. Ça n’est pas moins douloureux, mais je ne me sens pas abandonné. Et enfin, dans ces moments d’épreuves, tu m’indiques le matin de Pâques : une pierre roulée, un tombeau vide. La résurrection est encore bien faible pour nous, ici-bas. Mais je crois qu’elle est véridique et que ton amour m’y mène. Je l’attends avec impatience, Seigneur ! Que vienne Pâques ! Que vienne Pâques en nos cœurs ! Que vienne Pâques en nos vies ! Mais je sais bien que nous sommes encore en carême. Combien il est difficile, le carême de nos vies ! Mais Pâques vient ! Que vienne ta Pâques !

Thomas Sabbadini